dimanche 24 juillet 2011

Un pessimiste n'est jamais déçu.


LO 453. 23 juillet 2011
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NORGE


Entendu dans un débat sur LCP (il y a quelques mois et pas du tout à propos des récents frais évènements de Norvège) : « Ce n'est pas la violence qui tue, ce sont les armes à feu. »
Comment ces gens (de grands responsables, des députés) peuvent-ils proférer dans le poste avec leur bouche de telle insanités. Quel peut bien être leur "être au monde" ?
— C'est pas moi, msieu, c'est la violence !
— C'est pas moi, msieu, c'est mon pistolet !
Je me rappelle le personnage joué par Tom Cruise dans "Collatéral". Quand le chauffeur de taxi lui dit : « Vous avez tué cet homme ! », il répond : « Je n'ai pas tué cet homme ; la balle sortant du pistolet l'a tué. »
Idiot, aberrant, insane (au sens de pathologique).
Ce qui tue, ce n'est ni "la violence" ni l'arme. C'est un individu qui tue un autre individu. C'est M. Truc qui tue M. Machin.
• La violence est une abstraction généralisante, un concept, une Idée pour définir un vaste phénomène – qui inclut ce M. Truc.
• Ce M. Truc se sert de ce qu'il a sous la main, couteau, pic à glace, moulin à café, arme à feu, pour tuer M. Machin. Un outil. Le problème de l'arme à feu, c'est que tuer devient très facile : un simple crispation d'un demi doigt.
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Le progrès a fait ceci : la Terre ne tourne plus, elle marche (ce qui veut dire en gros qu'on est passé d'une notion de temps cyclique, répétitif jour/nuit, lunaisons, saisons, année…), celle des primitifs, à une notion téléologique, celle de l'homme occidental technologiste : un temps fléché : ça va quelque part et forcément vers un mieux.)
Quand les nappes phréatiques sont vides, les végétarés se transforment en sado-gazoschiste. Ils allument des bougies pour fêter l'anniversaire de Tchernobyl et des lampes à pétrole pour l'anniversaire de la mariée noire du golfe du Mexique.
Cette année, c'est l'Arctique (pôle nord) qui a droit à un gros trou dans sa couche d'ozone. Le soleil cague à travers sa couche. On attends une recrudescence des cancers de la peau en Russie, Alaska, pays scandinaves… Garde-toi, Joly, maudite vikingue,
Les tsunamis de mes amis sont mes tsunamis. La nature n'est pas hostile, elle est implacable. Quand elle fait mine de se révolter, il n'est plus question de chercher à la domestiquer, il faut la mater. Matar : tuer. On s'y emploie, merci, et l'entropie, sans cesse combat l'utopie. Le technorrisme international frappe chaque jour et partout.
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Découplage
« Le printemps, les oiseaux chantent. L'été, les couples se forment. A la rentrée, les affaires sérieuses reprennent. Tiens, le découplage. Quand, à la fin de l'été ou dans la vie, les couples se défont, on parle de séparation. Si l'on a préalablement convolé dans le mariage, c'est le divorce. Et chez les pacsés ? On dépacse ? Enfin bon.
Revenons au découplage. Soit deux réalités évoluant de concert. Elles sont "couplées". Vraisemblablement, l'une dépend de l'autre. Si les deux réalités divergent, on dit qu'elles se "découplent".
Prenons un exemple. Tiens, la croissance. La divinité devant laquelle s'inclinent présidents, ministres, entrepreneurs, économistes, journalistes... « Croissance, ô croissance, monte, ô monte, sauve-nous, ô croissance ! » Un torrent de larmes, d'encre et de salive, jour après jour, implore, ausculte, vénère le fétiche : 1,6 %, tout va mal ; 2,4 %, on est sauvés.
Une secte irresponsable se gausse de cet unanimisme bêlant. On les appelle les "écologistes". « Plus votre économie croît, disent-ils, plus vous abîmez la biosphère, ruinant peu à peu les bases d'une économie saine et durable. » Il arrive que des économistes se laissent prendre à leurs objections, au lieu de garder l'oeil rivé sur l'horizon sacré de la croissance. Tiens, Tim Jackson, dont je vous ai naguère recommandé Prospérité sans croissance (De Boeck, 248 p., 17 euros).
Jackson ne parle pas de décroissance, il demande simplement si une économie croissante peut diminuer son impact sur l'environnement. Si oui, va pour la croissance. Sinon, il faut changer de modèle économique. Pour que la croissance soit acceptable, rappelle-t-il, il faut que s'opère un découplage entre l'évolution du PIB et celle de l'impact de l'économie sur l'environnement. Comment évaluer cet impact ? Par divers indicateurs, tels que les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d'énergie, ou la consommation de matières. Or, sur aucun de ces indices, ni l'humanité ni même les pays de l'OCDE n'ont réussi à opérer un découplage : depuis 1990, leur PIB a crû continûment, tout comme leur consommation d'énergie et de matières, et leurs émissions de gaz à effet de serre. Parfois, sur certaines périodes, le PIB a crû plus vite que les consommations, mais celles-ci n'ont jamais diminué, ce qui serait nécessaire pour réduire l'impact sur l'environnement. Et, alors que nous nous dirigeons vers neuf milliards d'habitants, la poursuite de la croissance mondiale ne peut qu'aggraver la dégradation de la biosphère, en l'absence de découplage. Il serait bien que présidents, ministres, économistes et tous les autres s'intéressent au découplage, non ? »
Hervé Kempf (LE MONDE 1er septembre 2010) (Mis sur FACEBOOK)
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Il y a des gens sismographes. Ils captent les troublements du monde.
Un pessimiste n'est jamais déçu.
Laissons l'optimisme aux simplets.
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Citations d'époque (1976) dans L'Express :
Barry Commoner, à la 1ère conférence mondiale sur l'environnement, Stockholm, 1972 : « La catastrophe écologique est inscrite inéluctablement dans notre avenir si nous ne prenons pas les mesures nécessaires……… »
Pierre Piganiol, physicien français, membre de Futuribles :  « Il est toujours difficile de jouer les Cassandre. Pour que le public ressente, prenne conscience, réagisse, accepte, il faut que l'évènement soit perçu concrètement, qu'il soit accompagné d'une certaine dramatisation. »
Barry Commoner : « Pour prendre les décisions qui s'imposent, je ne crois pas que des accords internationaux limités y suffiront. Ce sont les peuples du monde, clairement informés, qui les exigeront de leurs gouvernements. »
(Biologiste américain, engagé dès les années 50 dans la lutte contre les essais nucléaires. A fondé en 1980 le Parti des citoyens et s'est présenté sous cette étiquette aux élections présidentielles
Dans son livre « The Closing Circle » de 1971, Commoner a établi ses quatre lois de l'écologie, qui sont :
1. Chaque chose est connectée aux autres. Il y a une seule écosphère pour tous les organismes vivants et ce qui affecte l'un affecte tous les autres.
2. Chaque chose va quelque part. Il n'y a pas de déchets dans la nature, et il n'y a pas un ailleurs où l'on puisse jeter les choses.
3. La Nature sait. Le genre humain a développé la technologie pour améliorer la nature, mais un tel changement tend à être nocif pour le système.
4. Un repas gratuit, cela n'existe pas. Dans la nature, chaque côté de l'équation doit être en équilibre, pour chaque gain il y a un coût, et toutes les dettes seront payées.
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Rien ne se perd, rien ne se crée… disait Lavoisier.
(La maxime « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » attribuée à Lavoisier, est simplement la reformulation d'une phrase d'Anaxagore de Clazomènes : « Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau » (Wikipedia)

1 commentaire:

jean-luc SERRANO a dit…

Vous lire fait du bien Monsieur Caza. Merci.