dimanche 22 mars 2015

CRITIQUE, MOQUERIE, INSULTE ?


« La religion est une maladie de la raison » (critique médicale).
« La croyance est une démission de la raison » (critique philosophique).
« Les croyants sont tous des cons » (insulte à un groupe en raison de…)
« Les croyants me font marrer, avec leurs bondieuseries, patenôtres et salamalecs » (remarque certes moqueuse, mais où l'auteur exprime avant tout son sentiment personnel plutôt que de lancer une imprécation).
« Si les croyants ne veulent pas qu'on se moque des leurs croyances, ils n'ont qu'à pas avoir des croyances si rigolotes » (ironie).
« Crois, croix, croa-croa… » (déconne).
Cioran : « Toutes les religions sont des croisades contre l'humour » (cioranie).
George Santayana : « Il n'y a pas de pire tyrannie que celle d'une conscience rétrograde ou fanatique opprimant un monde qu'elle ne comprend pas au nom d'un autre monde qui n'existe pas » (critique politico-philosophique).
…… Disant des trucs comme ça, suis-je dans la critique, la moquerie, l'insulte, l'injure, l'imprécation, le blasphème…???
•••
Sachons distinguer :
- Merde !, c'est un juron ;
- Je t'emmerde !, une invective ;
- Tu n'es qu'une merde !, une insulte (injure, offense, outrage).
•••
J'ai récemment ressorti de sous un fauteuil les quatre tomes qu'il me reste (de famille) du Larousse du XXème siècle en 6 tomes (énormes) datant des années 30. Je m'en inspire ici pour tourner autour de ces termes qui reviennent : insulte, injure, outrage, offense…
INSULTE, INSULTER
À la base, c'est une attaque au sens militaire. (Voir Offense, offensive.)
Couramment, c'est une offense en parole ou en acte.
Les synonymes ou approchants sont nombreux et il est difficile, à la longue de différencier… Raillerie, injure, affront, avanie, outrage, parole blessante, insolence…
Au sens figuré : « Le luxe insulte à la misère publique. » « Trop de commentaires sur Facebook sont des insultes à l'orthographe et à la grammaire. »
Dans un duel, il y a insulteur et insulté (qui a le choix des armes).
Tiens, amusant : dans l'antiquité romaine un général vainqueur était accompagné le long de sa procession de triomphe par un esclave "insulteur" qui l'accablait d'injures, histoire de lui rappeler que sa gloire ne le mettait pas à l'abri des reproches publics. L'ancêtre du bouffon du roi ? En ce sens, l'insulte, si elle est reçue et acceptée, supportée, garde ce rôle de leçon d'humilité.
Le Petit Robert, même petit, moins encyclopédique, est plus riche, littérairement parlant. Il m'amène toute une nébuleuse de termes liés, avec affront, agresseur, injure, offense, grossièreté, insolence, invective, déshonneur, indignité, atteinte à-, rabaisser, blasphème, défi…
•••
INJURE, INJURIER
A priori, j'y vois quelque chose de plus grave que l'insulte, mais c'est peut-être à cause du terme "jurer" qui a quelque chose de "sacré" ou de juridique ; ou à cause de l'anglais ou l'injure est d'abord un blessure au sens physique.
À la base, l'injure, c'est une injustice, un dommage ou un tort juridique, comme l'étymologie l'indique : jus, juris – la justice, d'où jurer, parjurer, jury, etc.
Au sens figuré : par exemple les injures du temps.
Couramment, c'est une action offensante ou une parole offensante. Toute expression outrageante ou terme de mépris ou invective, qui ne s'appuie sur aucun fait (contrairement à une accusation).
Injurier sera donc "offenser par des paroles blessantes". Par extension "dire du mal de-" (et donc délation, médisance, calomnie.) Pas de différence essentielle avec l'insulte, donc. (Les dictionnaires manquent de listes d'exemples, genre "petit con", ce serait une insulte, "gros con", ce serait une injure ?)
Dans le droit romain : atteinte physique ou morale à une personne, violence corporelle ou atteinte à l'honneur ou à la dignité d'une personne.
Dans le droit moderne (je rappelle que je consulte là un dico qui a 80 ans…), on a distingué injure non publique, semi-publique, publique. De nos jours où en est-on ? La distinction entre public et semi-public est déjà obsolète ou en tout cas fort difficile à définir : dans les médias, par e-mail, par lettre, dans un livre, sur les réseaux sociaux, on est dans quel degré de "public" ? Quant à la vie privée, elle est en voie de disparition.
Là encore, le Petit Robert amène quelques lumières supplémentaires : affront, avanie, insulte, outrage, attaque, calomnie, insolence, insulte, invective, sottise, gros mot, ordure, outrage, engueuler, traiter de-, blessant, mortifiant, diatribe… Décidément, le vocabulaire des relations humaines négatives est riche !
•••••••••
(à suivre)


Aucun commentaire: